Pêche : L’impunité appelle la récidive

Date 14-02-2008 19:50:00 | Sujet : Actualité Agadir et région

L’impunité appelle-t-elle la récidive ? En tout cas elle ne peut la justifier en aucune manière.B On se rappelle du cas de la société “Frigima”, qui, en date du 13 février, a été prise en flagrant délit de tentative d’exportation illicite de poulpe. L’histoire a commencé par une commission composée, entre autres, du chef du service de contrôle à la Wilaya d’Agadir, du délégué de la pêche maritime par intérim, du délégué de l’ONP, de deux cadres de la délégation des pêches maritimes et d’un chercheur assermenté auprès du service économique et social à la Wilaya d’Agadir.

Le PV de cette commission fait état de la découverte d’un camion à l’intérieur de la société, avec une cargaison de plusieurs tonnes de poulpe. Les responsables de la société avaient présenté alors des documents pour justifier la provenance du poulpe, documents avérés faux à plusieurs égards.
Selon le constat de la commission, les documents présentés par la société faisaient état de 2330kg alors que la cargaison était de 9179kg (près de dix tonnes). Certains documents étaient datés du 13 décembre à Laâyoune, alors qu’à la même date, le camion était déjà dans le hall de la société (même s’il était conduit par Schumacher, il n’aurait jamais pu égaler une telle prouesse mécanique).

Bref, la commission avait fait son travail et procédé à la saisie de la cargaison qui fût vendue aux enchères publiques à la halle de poisson d’Agadir. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Le 19 décembre, conformément au PV de la commission sus mentionnée, et conformément aussi aux prérogatives du dahir portant loi du 23 novembre 1973 formant règlement sur la pêche maritime, le délégué des pêches maritimes à Agadir adresse une note au parquet du tribunal de Première instance d’Agadir lui demandant d’engager des poursuites contre le propriétaire et le conducteur du camion. Or, le dahir de 1973 est clair en la matière puisqu’il stipule dans ses articles 48 et 49 qu’ « au vu du procès-verbal constatant l’infraction [...] le chef du quartier maritime saisit le procureur du Roi près la juridiction compétente aux fins de poursuites ». Jusque-là tout va bien. Dans son article 34, le dahir punit d’emprisonnement et d’amende ou de l’une de ces deux peines seulement « quiconque dans l’établissement ou l’exploitation des pêcheries, parcs ou dépôts autorisés aura contrevenu aux dispositions du présent dahir.... » (Alinéa 3 de l’article 34).

Le deuxième PV de la commission, établi en date du 14 décembre 2007, affirme :

« La responsabilité du propriétaire est établie du fait qu’il était en possession des quantités de poulpe trouvées dans le camion et celles trouvées à l’intérieur de sa société ».

La question qui se pose est : pourquoi le délégué des pêches maritimes d’Agadir a épargné le propriétaire de FRIGIMA dans la demande de poursuite adressée au parquet d’Agadir ? Se contentant, seulement de la demande de poursuite contre le chauffeur du camion et de son propriétaire ?

Et comme les mêmes causes rappellent les mêmes effets, la société FRIGIMA vient d’être épinglée encore une fois pour une histoire similaire.

Un procès-verbal datant du 11 février 2008 émanant d’une commission mixte composée de toutes les administrations concernées par la commercialisation et l’exportation du poisson congelé, fait état d’un camion immatriculé en Espagne qui a été contrôlé à l’entrée du port d’Agadir. Il s’agissait d’une cargaison destinée à l’exportation par la société FRIGIMA. La commission a procédé à la reconduction du camion aux frigos de la société pour procéder au contrôle précis de la cargaison. Là, encore une fois, il s’est avéré une grande différence entre le tonnage réel de la cargaison et celui mentionné sur les documents présentés par les responsables de la société.

En effet, alors que les documents font état de 18406 kg, le poids réel de la cargaison constaté par la commission mixte est 20542kg, soit une différence de plus de deux tonnes.

Pire, la commission a découvert dans la cargaison près de deux tonnes et demie (2380kg) du poulpe du calibre Tako9 dont la capture est strictement interdite. La cargaison contenait aussi quelque 6624 kg de tako8, juvénile mais toléré selon un quota dit By Catch, seulement les responsables ne déclaraient sur leurs documents que 178 caisses alors que le camion transportait 619 caisses de ce calibre.

La commission a procédé aussi à l’inventaire de tous les produits et espèces contenus au sein de la société. Elle a recensé 63988 kg de différentes espèces de poissons dans les frigos. Calamars 14372kg, poulpe 42732 kg, crevettes 4356 kg et ombrines 2528 kg.

Une quantité beaucoup plus importante que celle recensée au dernier PV établi lors de l’opération du 13 décembre. Autrement dit, et sachant que la société frigima est frappée de suspension d’activité pour question d’hygiène, on ne s’explique pas comment elle a pu continuer à vaquer tranquillement à ses activités de transformation et de congélation des poissons.

Plus grave encore, dans les quantités découvertes de calamars, la commission a découvert quelque 1800 kg de ce céphalopode, importés sous le régime de l’Admission temporaire mais périmés depuis la mi-2006.

Sachant que les importations se font par conteneurs, on est en droit de s’interroger sur le sort réservé au reste de cette cargaison de calamar. A-t-elle été réexportée, ou a-t-elle été écoulée sur les marchés locaux ? Espérons que la commission qui a découvert le pot-aux-roses rassure le consommateur marocain.

L'Opinion



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