Actualité Agadir et région: Enquête : Le projet arganier de la discorde
Posté par: Visiteursur 17-03-2010 20:48:17 2048 lectures Le Centre d'Azrarague à Agadir qui était destiné à 2.000 femmes rurales a été réduit à 300 bénéficiaires.L'histoire du Centre d'extraction d'huile d'argan dans la commune rurale d'Azrarague en province d'Agadir peut se résumer à un gâchis. En effet, ce projet destiné à préparer les coopératives de concassage et d'extraction d'huile, situées dans les provinces de Chtouka Aït Baha, Essaouira, Tiznit et Agadir, à produire selon les normes internationales en matière de sécurité sanitaire des aliments, et à lutter contre la pauvreté, se trouve au cœur d'une polémique.
Retour en arrière
Grâce à une subvention de 1,6 million de DH de la principauté de Monaco et à un don d'un terrain d'un mécène, l'association Ibn Albaytar pour la promotion des plantes médicinales, porteur de ce projet, disait avoir eu tous les moyens pour le réussir. Sur proposition de la wilaya d'Agadir, cette association avance avoir accepté d'intégrer ce projet dans le cadre de l'Initiative nationale pour le développement humain (INDH), qui avait apporté un million de dirhams supplémentaires à ce projet. Mais depuis cette adhésion à l'INDH, l'association Ibn Al Baytar indique qu'elle a été marginalisée de la gestion de ce centre par l'Union des coopératives féminines de Tifaout N'Ougadir, gestionnaire actuel du centre. Pour calmer les esprits, une rencontre présidée en octobre 2009 par l'ancien ministre de l'Intérieur Chakib Benmoussa, a eu lieu à Rabat. Cette réunion, à laquelle toutes les parties concernées avaient été invitées, s'est prononcée pour la mise en place d'une commission d'enquête.
«La commission s'est rendue sur place et elle a entendu plusieurs femmes. Mais jusqu'à présent, nous n'avons pas encore eu son rapport», a indiqué Khadija Rahlimi, directrice du centre d'Azrargue.
Pour sa part, l'association Ibn Al Baytar proteste pour ne pas avoir été entendue par la commission d'enquête et crie à la discrimination. «La commission n'a pas fait de discrimination, répond Saloua Benkirane, chef de la division sociale, responsable de l'INDH à la wilaya d'Agadir. Lorsqu'elle s'est déplacée à Agadir, elle a rencontré seulement les personnes non présentes à la réunion organisée à Rabat». «Faux», rétorque Zoubida Charrouf, présidente de l'association Ibn Al Baytar. «Lors de la rencontre de Rabat, M. Benmoussa m'a bien signifié de coopérer avec cette commission». A la wilaya d'Agadir, les responsables proches de ce dossier préfèrent se référer à l'esprit de la convention. «La convention signée dans le cadre de l'INDH relative au centre d'Azrarague concerne deux parties: la wilaya et l'association Ibn Al Baytar.
Quant à la gestion du centre, elle relève, selon cette convention, de l'Union des coopératives féminines de Tifaout N'Ougadir, dont la présidente a été élue démocratiquement», affirme Abdellah Fars, chef du Service Suivi et Évaluation des projets INDH. Autre problème qui a déclenché la polémique: des accusations relatives à l'importation, grâce à une aide monégasque, d'une machine d'extraction d'huile, jugée défectueuse par une personne du Groupement d'intérêt économique (GIE) de Targanine, chargé de la commercialisation des produits d'argan. Dans ce sens, la présidente de l'association Ibn Al Baytar dit avoir été l'objet d'une campagne de dénigrement. Un article publié en octobre 2008 dans un quotidien national l'avait en effet accusée d'avoir importé une machine défectueuse.
Dégâts collatéraux
Pour jeter de l'huile sur le feu, une personne du GIE avait adressé un courrier électronique anonyme à Jérôme Froissart, chef à l'époque de la division du département des relations extérieures monégasque, pour lui signaler l'article calomnieux. La réponse ne s'est pas trop faite attendre. Dans un courriel adressé à la chef de la division sociale, responsable de l'INDH à la wilaya, Saloua Benkirane, M. Froissart dément ces accusations : «Je vous informe que nous avons reçu un mail très désobligeant de la part du GIE Targanine à caractère diffamatoire envers l'association Ibn Al Bayar et par voie de conséquence la principauté de Monaco. Cette machine a été achetée par le gouvernement monégasque dans le cadre de notre coopération avec le Maroc, auprès d'un fabricant français. Elle répond bien aux normes sanitaires européennes. La wilaya, partenaire de ce projet, est par conséquent, malheureusement impliquée dans ces propos.
Nous vous apporterons bien entendu tout notre soutien pour défendre notre projet commun contre ce genre de diffamation». Toutefois, l'ombre de la machine défectueuse continue de planer. Un rapport existant à la wilaya et dont les responsables ont refusé de nous donner une copie révèle que la machine a déjà fait une première «visite» chez un réparateur. Sa couleur a également changé du bleu au blanc. «Effectivement, répond madame Charouf, la machine a passé plus de six mois dans des locaux en attendant la signature de la convention exigée par Monaco. Après ce temps, elle a montré des signes de rouille et nous l'avons confiée à un réparateur pour la nettoyer. Sa couleur a été également changée pour qu'elle soit conforme à celle du centre d'Azrarague». En se déplaçant en janvier dernier au centre d'Azrarague, nous avons constaté que l'extraction d'huile d'argan se fait avec une petite machine. Notre accompagnateur, Abdellah Fars, chef du Service Suivi et Evaluation des projets INDH, nous a expliqué qu'une bonne partie du matériel du centre, fournie par l'association Ibn Al-Bayar est non opérationnelle. «Voici donc la machine objet de la polémique. Elle ne fonctionne pas parce qu'elle n'est pas adaptée aux huiles raffinées comme l'argan. Elle peut servir notamment à l'extraction de l'huile de tourne-sol. Pour qu'elle soit opérationnelle, il faut l'adapter».
Et d'expliquer: «Elle ne peut démarrer que lorsqu'il y a une grande quantité d'argan. Pour l'instant, le centre ne peut se permettre une telle production faute de matière première». Pour Mme Charrouf, «la machine en question est connue et utilisée par tous les industriels qui font de l'extraction de l'huile d'argan. Si elle ne peut fonctionner faute de matière première, c'est parce que le centre a été détourné de sa vocation première. Il devait bénéficier à quelque 2.000 femmes des coopératives de toute la région Souss-Massa Drâa. Aujourd'hui, il a été réduit seulement à 300 bénéficiaires vivant dans les environs d'Agadir».
ForĂŞt du Sud
Le projet d'appui à la préservation et à la gestion de l'arganeraie «Tagant N'Ifouss» (Forêt du Sud) s'inscrit dans le cadre du projet arganier, piloté par l'Agence de développement social (ADS) et géré par l'Unité de gestion du projet arganier (UGP) en coordination avec la Direction régionale des eaux et forêt du sud ouest (DREF). Ce projet, mis en œuvre par le Centre national de développement et d'alphabétisation (CNDA), vise l'implication des populations locales à travers les associations dans la gestion participative et rationnelle des ressources arganières dans les communes rurales de Tinzert, Tiout, Imi Mkourne et Aït Baha. Le projet a été financé dans le cadre du Projet arganier à hauteur de 75% et réalisé en partenariat avec la DREF. Le reste a été financé par le CNDA à hauteur de 25%.
Repères
Moyens suffisants
Grâce à une subvention de 1, 6 million de DH de la principauté de Monaco et à un don d'un terrain d'un mécène, l'association Ibn Al Baytar disait avoir eu tous les moyens pour réussir le projet.
Commission d'enquĂŞte
«La commission s'est rendue sur place et elle a entendu plusieurs femmes. Mais jusqu'à présent, nous n'avons pas encore eu son rapport», a indiqué Khadija Rahlimi, directrice du centre d'Azrargue.
Gâchis
Le centre a été détourné de sa vocation première. Il devait bénéficier à quelque 2.000 femmes des coopératives de toute la région Souss-Massa Drâa. Aujourd'hui, il a été réduit seulement à 300 bénéficiaires vivant dans les environs d'Agadir.
LE MATIN